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Nouvelles obligations des employeurs au Québec et au Canada en 2023 et 2024 : un paysage juridique en évolution

Par Monette Barakett


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Monette Barakett

Au Québec, les modifications apportées aux lois du travail touchent directement les employeurs, les obligeant à revoir et à adapter leurs politiques et procédures internes. Dans la dernière année, les autorités québécoises ont adopté et proposé des mesures visant à améliorer la protection des travailleuses et travailleurs, allant de l’usage du français à la lutte contre le harcèlement en passant par les nouvelles exigences en matière de protection des renseignements personnels.

Parallèlement, le gouvernement fédéral a également pris des mesures pour moderniser le cadre réglementaire entourant le domaine de l’emploi. Les nouvelles obligations au plan fédéral touchent divers aspects comme l’équité salariale, l’usage de la langue française, etc.

Travail des enfants

Le gouvernement provincial s’est engagé à renforcer la protection des jeunes par le biais de la Loi sur l’encadrement du travail des enfants. Cette législation vise à garantir des conditions de travail sécuritaires et équitables pour les personnes d’âge mineur.

Les obligations des employeurs québécois en vertu de cette nouvelle législation comprennent des dispositions concernant les heures de travail et les conditions particulières liées à la nature des tâches assignées aux jeunes travailleurs et travailleuses. Ces nouvelles obligations ont pour but de préserver le droit à l’éducation en imposant des balises claires aux employeurs pour l’emploi des jeunes dont l’âge est de moins de 14 ans et moins de 16 ans. Sauf exception, il est dorénavant interdit de faire travailler une ou un jeune de moins de 14 ans.

Par ailleurs, cette loi prévoit également des obligations précises en matière de santé et de sécurité pour les jeunes.

Protection des renseignements personnels

La protection des renseignements personnels occupe le devant de la scène législative au Québec, et ce depuis 2022, avec l’adoption de la Loi modernisant des dispositions législatives en matière de protection des renseignements personnels. Ces nouvelles dispositions visent à renforcer la confidentialité et la sécurité des données personnelles recueillies. Des obligations plus importantes sont imposées aux personnes qui exploitent ces informations sensibles, notamment les employeurs québécois.

Depuis le mois de septembre 2022, ces derniers sont tenus de modifier leur organisation afin d’implanter des pratiques réduisant les chances de fuites de données par la nomination d’une personne responsable de la protection des renseignements personnels, la création de registres d’incident et l’obligation d’aviser la Commission d’accès à l’information (ci-après « CAI ») en cas d’incident relatif à la confidentialité des renseignements personnels.

En septembre 2023, une deuxième série de dispositions sont entrées en vigueur et concernent l’adoption de politiques et de pratiques encadrant la gouvernance des renseignements personnels. De nouvelles obligations de transparence sont également en vigueur depuis cette date obligeant les organisations à publier leur politique de confidentialité. Les organisations doivent également réaliser une évaluation des facteurs de risques relatifs à la vie privée. De nouvelles règles sont également en vigueur concernant le consentement à la collecte, la communication et l’utilisation des renseignements personnels.

Essentiellement, ces modifications confèrent plus de protection aux personnes et pour s’y conformer, les employeurs québécois devront focaliser sur la prévention et la proactivité, notamment par l’obtention de consentement valide conforme aux nouvelles lignes directrices établies par la CAI lors de la collecte de renseignements personnels. De plus, les nouvelles dispositions introduisent un régime de sanctions pécuniaires et administratives pour les entreprises qui ne respecteront pas ces nouvelles obligations. 

Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail

De nouvelles dispositions de la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité au travail au Québec sont entrées en vigueur en 2023 et représentent une nouvelle étape dans l’évolution des normes en matière de sécurité au travail. Ces nouvelles dispositions apportent des changements dans le traitement des dossiers de lésion professionnelle en modifiant certains délais de contestation de décision.

Ainsi, une partie en désaccord avec une décision de la CNESST pourra dorénavant, à l’égard de certaines décisions seulement[1], demander à la CNESST de réviser sa décision dans les 30 jours ou contester directement la décision de la CNESST devant le Tribunal administratif du travail dans les 60 jours, et ce, sans devoir en demander la révision. À cet égard, le délai pour contester une décision devant le TAT est passé de 45 à 60 jours.

En matière de prévention dans le domaine de la construction, certaines dispositions de la loi entreront en vigueur en 2024, notamment en matière de formation des membres du comité de chantier, les personnes assurant la représentation et la coordination en santé et sécurité.

L’équité salariale

Le gouvernement fédéral renforce également son engagement envers l’équité salariale avec la Loi sur l’équité salariale visant à éliminer les écarts salariaux entre les hommes et les femmes au sein des entreprises. Les nouvelles obligations sont en vigueur depuis 2021 et imposent aux employeurs fédéraux de mettre en œuvre un plan d’équité salariale afin de garantir une rémunération juste et équitable. En effet, les organisations employant 10 salariés ou plus sont tenues de réaliser une démarche d’équité salariale selon les exigences de la loi.

L’échéance pour l’élaboration et la publication de leur plan d’équité salariale est fixée au 3 septembre 2024.

Lois sur la langue française

En 2023, le gouvernement fédéral a légiféré en matière de langues officielles. La loi modifiant la Loi sur les langues officielles a été sanctionnée en juin 2023 et renforce le droit des Canadiennes et Canadiens de recevoir des services gouvernementaux dans la langue officielle de leur choix. Conséquemment, les institutions fédérales doivent revoir leurs obligations en matière de bilinguisme.

De plus, la Loi visant l’égalité réelle entre les langues officielles du Canada a également été sanctionnée en 2023, mais elle n’est pas encore entrée en vigueur. Cette nouvelle loi vise notamment les entreprises privées de compétence fédérale exerçant leurs activités au Québec. Les employeurs devront s’adapter aux nouvelles directives en rendant possible l’utilisation du français dans les communications internes et externes, et en mettant en place des mesures concrètes pour encourager l’utilisation de la langue française au sein de leurs équipes. Les entreprises visées par cette loi devront faire le choix d’appliquer et d’être régies soit par la loi 101 du Québec ou la loi fédérale.

En 2022, le gouvernement provincial a, quant à lui, adopté la Loi sur la langue officielle et commune au Québec qui modifie notamment la Charte de la langue française. Plusieurs dispositions sont déjà entrées en vigueur depuis cette date dont l’obligation d’avoir des communications bilingues dans les organisations. En 2024, les entreprises devront procéder à la traduction des contrats de travail et des conventions collectives qui seraient uniquement en anglais si ces documents sont toujours en vigueur après le 1er juin 2024.

Grève et lock-out

Le gouvernement fédéral entreprend depuis la fin de 2023 une réforme significative du Code canadien du travail et du Règlement de 2012 sur le Conseil canadien des relations industrielles, modifiant ainsi les règles pour les employeurs sous compétence fédérale en temps de grève ou de lock-out, ainsi que les pouvoirs du Conseil canadien des relations industrielles en matière de services essentiels.

En effet, des projets de loi ont été déposés en la matière et visent à limiter la possibilité pour les employeurs d’avoir recours aux travailleuses et travailleurs de remplacement en contexte de grève et ceci, incluant le télétravail. Par ce projet de loi, il est également proposé l’abolition de la nécessité pour un syndicat de démontrer l’intention d’un employeur de miner la capacité de représentation syndicale en ayant recours aux services de personnel de remplacement. Ceci affectera vraisemblablement le rapport de force en ce qui a trait aux négociations de conventions collectives sous le régime fédéral.

Le projet de loi propose la revue de la procédure de détermination des activités essentielles à maintenir en temps de grève ou de lock-out en imposant aux parties la détermination d’une entente conclue dans le respect d’un délai de 15 jours.

Harcèlement professionnel et violence à caractère sexuel

En novembre 2023, le ministre Boulet a déposé le projet de loi 42 visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel en milieu de travail. Son objectif est de rendre les milieux de travail plus sains, respectueux et sécuritaires. Le projet de loi vise également à éliminer les comportements inacceptables et faciliter les recours pour les victimes de ces comportements.

Le projet de loi comprend également différentes mesures en matière de prévention et de protection lors de dénonciation. Une limite aux clauses d’amnistie en matière de violence physique et psychologique est également proposée. Il s’agit sans aucun doute d’un projet de loi à suivre au courant des prochains mois.

Équité en emploi

Le gouvernement fédéral a également mentionné son intention de revoir la Loi sur l’équité en matière d’emploi afin d’inclure de nouveaux groupes désignés, dont les personnes racisées et les personnes de la communauté 2SLGBTQ+. Il s’agit également d’un autre dossier à suivre au courant de l’année.

Conclusions

De nouvelles obligations sont entrées en vigueur au cours de l’année 2023 et d’autres sont à venir durant de la prochaine année. Il est important, en tant qu’employeur, de rester à l’affût des nouvelles obligations en matière de droit du travail afin d’éviter toute sanction pour non-conformité.

1 Une décision rendue à la suite d’un avis du Bureau d’évaluation médicale, d’un avis du Comité spécial des présidents, qui analyse les maladies professionnelles pulmonaires, d’un avis du Comité des maladies professionnelles oncologiques, d’une décision en matière de financement ou d’une décision en matière d’imputation.

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